Le Projet Archéologique du Rocher des Aures

Rapport préliminaire de la campagne de prospections 2013

par Stephan G. Schmid et Caroline Huguenot

III. Interprétation préliminaire

Les résultats de la campagne 2013 de prospections archéologiques au Rocher des Aures nous ont fait découvrir l’existence d’une petite agglomération au pied sud de la pointe du Rocher. Pour le moment, tout indique qu’il s’agit là d’un village perché d’époque médiévale qui aurait fonctionné avec le castrum identifié sur la pointe même Pour ce castrum et les sources non archéologiques, voir Estienne 2008 : 30–31 ; voir également notre rapport 2011 pour les structures documentées. . La topographie, le plan général – pour autant qu’on puisse parler d’un plan en l’état actuel de nos connaissances – ainsi que la structure de cette petite agglomération correspondent à ceux des villages perchés médiévaux de la région De manière générale on consultera Mouralis 1924: 579–585 et surtout Démians d’Archimbaud 1973. , tout comme des régions avoisinantes Voir p.ex. La maison du castrum de la bordure méridionale du Massif Central 1996: passim ; Rémy 2000 : 58 fig. 18. .

Cette hypothèse semble également confirmée par la comparaison du plan des structures identifiées, indiquant une grande densité d’occupation avec des constructions resserrées Démians d’Archimbaud 1973: 86–92. 101. 107. . Il en est de même pour la technique de construction des murs et leur appareil etc. La maison du castrum de la bordure méridionale du Massif Central 1996: 68–72. . Un autre élément assez typique est indiqué par l’aménagement de niches murales, comme on a pu les constater à plusieurs reprises (cf. supra) Démians d’Archimbaud 1973: 79–80 ; La maison du castrum de la bordure méridionale du Massif Central 1996: 69 fig. 39 ; 72 fig. 42 ; 86–87. . En ce qui concerne le plan des structures, il est assez difficile d’aller plus loin en l’état actuel de la documentation, à savoir sans fouilles. Il serait par exemple tentant d’essayer d’expliquer la position angulaire des portes. Est-ce lié à des considérations d’ordre météorologiques, afin de protéger la partie intérieure des intempéries? Ou est-ce que nous affaire à un aspect lié à la fonction de ces pièces ? Un ensemble de pièce comparable à nos structures ST 33 à 35 (FT 10 ; figs. 16. 18) a été interprété comme une bergerie sur le site castral de Ratières (Drôme), et de manière générale on ne saurait être surpris par la présence de bêtes au rez-de-chaussée de ces pièces Pour Ratières, voir Rémy 1995: 175 fig. 5. .

La petite chapelle ST 32 s’accorde parfaitement avec l’interprétation du site proposé ici. Parmi les multiples exemples, citons celui de la chapelle du site castral du Tournel (Lozère), qui présente un plan et des dimensions comparables Rémy 2000: 47–48; la chapelle du Tournel, plus grande (7,3 m x 14 m), est une chapelle castrale, ce qui n’est pas le cas pour celle du Rocher des Aures ; un tel édifice, qui reste à identifier, se trouvait certainement près du pic du Rocher. .

Fig. 32 : Extrait de la carte de Cassini (IGN) avec « le vieux la Roche »
Fig. 32 : Extrait de la carte de Cassini (IGN) avec « le vieux la Roche »

Il serait bien entendu souhaitable de pouvoir déterminer de manière plus précise la chronologie de ce site castral. Les quelques données rassemblées pour le moment ne permettent guère de donner plus d’informations. Les textes Cf. supra n. 10. et les données archéologiques laissent supposer une date proche de l’an mil, à savoir dans les deux premiers siècles du 2e millénaire pour l’occupation de ce secteur. En ce qui concerne son abandon, on dispose d’encore moins d’informations. Peut-être notre site est-il à identifier avec « le vieux La Roche » sur la carte Cassini, indiqué par le symbole d’une bourgade en ruines (fig. 32). La position géographique pourrait y correspondre, ce qui pourrait au moins livrer un terminus ante quem pour l’abandon.

Les quelques tessons de céramique provenant des structures de notre village perché semblent bien s’intégrer au faciès de la céramique médiévale de la région, du moins pour autant que des non-spécialistes puissent en juger après un premier examen rapide Cf. p.ex. Gayraud 1975 ; Pelletier – Richarte – Waksman 2005. .